Si l'on considère les films précédents de Park Chan-wook celui-là est
étonnant et inattendu. Le réalisateur s'est incroyablement bien coulé dans le
moule hollywoodien (ce qui est loin d'être un défaut surtout quand c'est
fait avec autant d'intelligence et de maestria), et il nous offre un film d'une sobriété,
d'une beauté et d'une élégance rares. C'est surtout la beauté et l'élégance
qu'on n'attendait pas trop au vu des œuvres précédentes.
Preuve est faite qu'il est à son aise dans tous les styles et tous le
genres.
La séquence d'ouverture du film est superbe. On voit une jeune
fille, perchée sur des talons hauts traverser une route. Suit alors, en voix
off, une tirade philosophique dans laquelle elle tente de définir qui elle est.
A la fin de la séquence, nous la voyons en contre-plongée et à contre-jour, sa
jupe flotte au vent. C'est un très beau plan. Durant toute cette introduction,
il y a une série d'arrêts sur image dont j'ai beaucoup aimé l'effet... J'ai
d'autant plus aimé le procédé quand j'ai compris le sens de cette
scène inaugurale, à la fin...
Cette jeune fille que nous venons de découvrir, c'est India, elle
est très intelligente et un peu bizarre, solitaire. Elle vit dans une grande
maison isolée avec son père et sa mère. Le début du film marque une rupture dans sa
vie. C'est le jour de son anniversaire et son père trouve une mort brutale dans
un accident de voiture. Suit l'enterrement, puis l'arrivée du frère de son père,
Charlie, dont personne ne lui avait jamais parlé. Charlie s'efforce de séduire
la mère, et surtout la fille... Charlie est souriant,
charmeur, trop, un peu bizarre aussi et inquiétant, et on commence à se poser des questions
sur ses motifs, sur son identité, sur le jeu qu'il joue, et puis sur la
mère, et la fille... En rien de temps, nous voilà devenus
paranoïaques... On passe le reste du film en doutant de tout et de tous...
Certains l'ont déjà fait remarquer, c'est un film très hitchcockien dans sa
conception et son déroulement.
C'est un petit bijou. Magnifiquement
filmé, hyper stylisé, contrôlé. Des images impeccables, très léchées. Les
acteurs (Mia Wasikowska, Nicole Kidman et Matthew Goode) sont excellents dans
leur rôle. C'est un film à la fois classique par son élégance et son côté
intemporel, et novateur par le traitement de l'image. Et pour ne rien gâcher,
nous sommes gratifiés d'une excellente bande sonore, avec notamment l'envoûtant
"Becomes the Color" d'Emily Wells...
C'est un film fascinant, le genre de
cinéma que j'aime vraiment beaucoup.
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Sur le DVD, parmi les bonus, figure un clip sur la conception de l'édition
limitée de l'affiche du film (ci-dessus). Une séquence de dessin absolument
fantastique, scénarisée, entrecoupée d'images du film, le tout au son de
"Becomes the color". Entre dessin, cinéma et musique, quelques minutes qui
représentent une sorte de quintessence de la création - un moment de pur
bonheur.
(On trouve ce clip sur internet, mais si vous n'avez pas vu Stoker,
faites-vous une faveur, regardez-le film avant d'aller voir le clip.)
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