Ne faisant pas partie des personnes indispensables au fonctionnement du pays, le confinement me permet de renouer avec le bonheur des choses simples, comme prendre mon temps, apprécier l'instant qui passe, lire de bons livres, regarder de bons films et réfléchir sur la vie. C'est cette existence-là dont j'aimerais qu'elle soit la règle et non l'exception.
En fana de cinéma asiatique, j'ai cherché des œuvres qui entrent en résonnance avec ce retour sur soi et la vie quelque peu érémitique qui nous est imposée. Sans surprise, j'ai trouvé cela au Japon, car si la vie moderne a fait perdre en partie aux Japonais leur philosophie d'inspiration animiste et zen, ils ont encore de beaux restes et sont toujours les maître du genre.
Mori, The Artist’s Habitat (Mori no Hiru no Basho), 2018, de Shuichi Okita, est un film qui raconte, ou plutôt montre, car il n’y a pas véritablement d’intrigue, la vie retirée d’un vieil artiste, Mori, qui habite une maison traditionnelle devant laquelle s'étend un jardin, fouillis, végétal, anarchique et labyrinthique que tous les matins il se prépare à aller explorer comme l'on partirait pour une expédition dans la jungle. Du jardin traditionnel, l'endroit possède le parcours sinueux, le petit bassin à poissons rouge et les multiples points de vue où l'artiste s'arrête longuement pour observer insectes, animaux, minéraux et tout ce que la nature offre à sa perception. C'est ainsi qu'il passe ses jours, perdu dans la contemplation des fourmis, d'une pierre, à la manière des artistes d'Orient dont l'observation, l'imprégnation du sujet est une part essentielle du travail. La nuit, il s'enferme dans le secret de son atelier pour accomplir des besognes mystérieuses, comme peindre ou réparer de vieux objets. Retiré du monde, avec pour seul horizon son jardin, c'est le mode de vie qu'il a choisi il y a plus de trente ans. Une vie retirée, mais pas solitaire pour autant car son épouse et sa nièce veillent sur lui et gèrent le quotidien. Elles s'occupent des visiteurs et lui transmettent leur requêtes, car l'artiste est célèbre et donc sollicité.
La tension est apportée dans l’histoire pas la construction d’un immeuble qui une fois édifié privera le jardin de soleil. Des militants combattent sa construction et l'entourage de l'artiste s'inquiète pour le vieil homme car c'est là tout son univers. Pourtant, il s'adapte sans sourciller. En vieux sage, il a sans nul doute intégré le principe de l'impermanence des choses.
A la fin du film, l’immeuble est construit. De sa terrasse, on a une vue plongeante sur la propriété où la vie continue, inchangée. Ce jardin qui nous paraissait immense, semble alors minuscule, enclavé au milieu du chaos des pavillons de banlieue, ultime refuge d’une nature que l'on respecte encore.
Peut-être pouvons nous en tirer la morale de l’histoire ; la moindre parcelle de végétation préservée, si petite soit-elle, est un monde en soi, et d’une richesse infinie, dans lequel chaque individu, si minuscule soit-il, a son rôle à tenir. Ce film est un hymne à la nature, à la vie simple, à la contemplation et à ceux qui savent regarder le monde.
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