Pascal TORRES, Les Batailles de l'Empereur de Chine –
La Gloire de Qianlong célébrée par Louis XV, une commande royale d'estampes, 2009
La Gloire de Qianlong célébrée par Louis XV, une commande royale d'estampes, 2009
Parmi mes découvertes récentes, cet ouvrage publié en accompagnement d'une exposition qui s'est tenue au Louvre en 2009, et qui raconte dans le détail l'histoire des seize estampes commandées par l'Empereur de Chine à la France dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle.
L'histoire commence en janvier de 1766, par cette lettre de l'Empereur de Chine confiée aux représentants de la Compagnie des Indes :
"Je veux que les Seize Estampes des victoires que j'ai remportées dans la conquête du Royaume de Chumgar et des pays mahométans voisins que j'ai fait peindre par Lamxinim(*) et par les autres peintres européens qui sont à mon service dans la villa de Pékin, Soient envoyées en Europe où l'on choisira Les meilleurs artistes en cuivre afin qu'ils puissent rendre parfaitement et dans toutes leurs parties chacune de ces Estampes, sur des Lames de cuivre…"
La Compagnie des Indes ne bondit pas de joie de se voir chargée d'une telle mission :
"L'honneur d'avoir été choisis entre les autres nations pour décorer le Palais de sa Majesté Impériale est assurément très flatteur, mais il nous expose à des embarras que nous eussions été plus aise d'éviter."
Ce n'était en effet pas une mince affaire que de répondre aux attentes du puissant souverain, d'autant que le personnel de la Compagnie des Indes n'était pas qualifié pour gérer ce type de commande. Fort heureusement, un employé ministériel zélé, Bertin, eut vent de la demande et prévint le marquis de Marigny, alors Directeur général des Bâtiments du Roi et Directeur de l'Académie Royale de Peinture, ainsi que le roi. Comprenant l'importance politique d'une telle commande, Louis XV se saisit personnellement de l'affaire, lui donnant une tournure nationale et officielle. La gestion du projet fut alors confié à Charles-Nicolas Cochin fils (1715-1790), lui-même artiste graveur, Intendant des Menus-Plaisirs.
Grâce à ce dernier, le projet fut mené à son terme et de manière magistrale. Cela ne se fit pas du jour au lendemain et pas sans mal, car la réalisation comportait tout un tas de difficultés techniques et d'obstacles. Il fallait compter environ deux ans de travail pour une gravure, les graveurs ayant le niveau nécessaire n'étaient pas légion, et il fallait obtenir d'eux qu'ils se consacrent entièrement à ce projet, et il fallait surtout que des artistes français rendent, dans le moindre détail, fidèlement et sans faute, une réalité qui leur était complètement étrangère.
L'empereur Quianlong reçut les dernières gravures en 1776. Elles étaient destinées à illustrer les poèmes originaux qu'il avait composés durant la campagne de conquêtes qui avait duré de 1755 à 1759. Il en avait écrit plus de 220. Il fit publier un recueil comprenant gravures et poèmes. Cette entreprise créa un précédent, car il y eut par la suite d'autres campagnes immortalisées par la gravure, mais réalisées par les artistes chinois.
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(*)Lamxinim était le nom chinois du frère Jésuite Giuseppe Castiglione. Les autres artistes dont il est question étaient deux autres Jésuites, fr. Jean-Denis Attiret (Wang Zhi-Cheng), le P. Ignace Sichelbart (Ngai K'i-mong), et un Augustin déchaussé, le P. Jean Damascene (Ngan To-yi),qui devint plus tard évêque de Pékin. Ce sont eux qui introduisirent la gravure en taille douce à la Cour de Chine.
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